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3 décembre 2021 5 03 /12 /décembre /2021 18:16

     Et puisque ce moteur est en pièces, voyons un peu plus en détail ce qu'il me réserve.

     Le piston en fonte de 70 mm de diamètre comporte deux segments à coupe oblique de 4 mm d'épaisseur, il est à font plat, son axe fait seulement 10 mm de diamètre, la hauteur de compression est de 31.6 mm (environ). SIx trous de 10 mm permettent la lubrification du cylindre et l'évacuation de l'huile raclée. On note un marquage "EC" de fonderie à l'intérieur de la jupe.

     Un peu de métrologie.

     Le pied de bielle n’a pas de jeu sensible, j’ai tenté de désaccoupler bielle et piston en ôtant les bouchons de bronze en bout d’axe, mais j’ai appris que ce que je croyais être des bouchons emmanchés à force dans le piston pour bloquer l’axe ne sont en fait que des « patins » en forme de champignon emmanchés dans l’axe, qui servent à éviter le labourage du cylindre dans le cas où l’axe se déplacerait. En fait l’axe est monté dur dans le piston, l'extraire sans exercer des efforts d’ovalisation sur ce piston en fonte certainement fragile serait risqué, il restera en place.

     Diamètre en bas de jupe perpendiculairement et parallèlement à l’axe : 69.88 mm et 69.84 mm pour 69.84 mm dans la partie supérieure : ce piston est à peu près cylindrique.

     Battement vertical des segments dans leur gorge : 0.07 mm

     Jeu à la coupe : 0.3 mm sur une coupe inclinée à 45 d° soit environ 0.45 mm sur le périmètre.

 

    L'ouverture des becs à l'état libre, autrement dit l'élasticité résiduelle, ne me parait pas trop faible, je n'échangerai pas ces segments contre un refabrication hasardeuse.

     En résumé tout cela est encore bon pour le service.

     Cylindre de type borgne est en fonte, un gros bouchon est vissé en partie supérieure et un bloc chapelle d’échappement avec culbuteur est fixé par trois goujons.

     Métrologie :

     Mesure à l’alésomètre à quatre « altitudes » et dans deux axes, parallèle et perpendiculaire à l’axe du piston, les valeurs sont contenues entre 70.02 mm et 70.04 mm, l’usure est très faible, le jeu piston cylindre (en bas de jupe et perpendiculairement à l’axe) est égal à 0.15 mm.

     On ne note pas de traces de honage hélicoïdal, seulement de la rectification fine.

     Je profite du démontage pour vérifier l'implantation de la bougie de 18 à culot long qui équipait la moto et constate que son filetage dépasse à l'intérieur du cylindre, ce n'est pas bon car la calamine risque d'empêcher son démontage. J'utiliserai une bougie de 18 à culot de longueur standard.

 

     Vilebrequin :

     Deux masses qui portent le N° du moteur font  175 mm de diamètre et sont reliées par un maneton avec emmanchements coniques et écrou de 10 x 125. Le poids total est de 7.170 Kg. La course est de 90 mm soit 346 cc de cylindrée (alésage de70 mm).

     Les contrepoids d’équilibrage sont décalés de 39 degrés par rapport à l’opposé du maneton (vue côté embrayage), probablement à cause de l’inclinaison du moteur dans le cadre ? (ce qui me donnera un prétexte pour jouer avec mon programme de calcul d’équilibrage après mesure des différentes masses en présence)

     Métrologie :

     Diamètre des deux soies : 15.98 mm sur tous les axes de mesure.

     Alésage des paliers : 16.08 mm côté transmission et 16.07 mm côté distribution, ovalisation et conicité inférieures à 0.01 mm.

     Le jeu actuel est donc de 0.09 à 0.10 mm.

     Bielle :

     Entraxe : 165 mm, la tête et le pied sont montés sur bague en bronze.

     Métrologie :

     Jeu à la tête de bielle : une première évaluation est faite avant l’ouverture du vilebrequin avec un comparateur sur la bielle.

     Jeu vertical au pmh de 0.30 mm

     Jeu vertical à 90 degrés : 0.30 mm

    Jeu latéral au pmh : 0.05 mm

    Jeu latéral à 90 d° : 0.05 mm

     Conclusion :

     - mesures identiques quand le maneton est tourné de 90 degrés donc le maneton n’est pas ovalisé.

     - le jeu vertical est trop important il faut ouvrir le vilebrequin pour corriger ça.

Nota : cette évaluation n’est pas très précise car le touchau du comparateur s’appuie sur une zone brute de forge de la bielle qui a beaucoup de débattement angulaire au point de toucher les masses du vilebrequin.

     Ouverture du vilebrequin :

    Après avoir tracé des repères d'alignement qui seront peut-être utiles, je note la côte entre les volants pour la reproduire lors du remontage et … horreur ! 1.5 mm de défaut de parallélisme. Après réflexion je crains d’être à l’origine de ce défaut, en effet lors de l’utilisation du tournevis à choc pour démonter l’embrayage, je savais que la réaction de ces chocs était encaissée par la flexion du maneton mais je n’imaginais pas que le diamètre du maneton était aussi faible : 14 mm !

     D’ailleurs la correction du parallélisme avant désassemblage a été facile : un tournevis et un petit boulon de 6 mm entre les masses ont suffi. Avant l’ouverture je réalise des cales de 8.80 mm qui me serviront à garantir la cote et le parallélisme entre les volants lors du remontage.

     Un léger coup de burin bien affuté et le « clou » de blocage de l’écrou de 10 (21 sur plats) a sauté. Je suis surpris du faible couple de desserrage, de même la séparation des volants n’a pas nécessité de chauffe, deux boulons de part et d’autre du maneton à peine serrés ont suffi.

     Je note sur les deux masses des traces de "clou" d'immobilisation de l'écrou ainsi qu'un impact d'outil, aurait-il été déjà démonté ?

     Les soies sont fixées aux masses par cinq rivets.

      Marquages des masses  sur la face interne : P2 et D2

     J’ai l’impression d’avoir dans la main un pied de bielle de mes 125 U46C, à part que les trous de lubrification ne sont pas du même côté … et que sur mes 125 le diamètre est plus gros : 16 mm contre 14 ! Il est vrai que les 350 cc du moteur de l’Ultima ne revendiquent que 3.25 chevaux contre 5 ou 6 pour les 125 U46C.

     Un peu de métrologie :

     Diamètre du maneton : 13.96 quel que soit l’axe de mesure.

     Alésage de la bague bronze : 14.31 mm en vertical et 14.05 en horizontal avec une légère conicité). Le jeu vertical exagéré est confirmé.

     Conclusions intéressantes :

     -   le jeu important de la bielle dans le sens vertical est due à la tête de bielle seule et non au maneton qui est bien cylindrique.

     - l’ovalisation est principalement due à l’usure de la bague en bronze et non à la déformation par fluage de son logement. On remarque d’ailleurs cette usure au niveau des « pattes d’araignée » qui ont presque disparu dans la partie supérieure de la bague. On note aussi une cassure du bord de la bague.

 

     Remarques :

     1 - comment se fait-il que ce moteur qui ne présente que très peu d’usure par ailleurs ait une tête de bielle aussi usée ? Il est clair que le faible diamètre de 14 mm me parait sous-dimensioné mais il y a probablement une autre raison : le couple axe en acier et bague bronze est excellent pour les frottements, sous réserve que l’état de surface de l’axe soit parfait sinon c’est par abrasion que j’axe « grignote » le bronze. Dans un montage « normal » c’est plus souvent « le mou qui use le dur », en fait ce sont les impuretés dures véhiculées par l’huile qui s’incrustent plus facilement dans le mou, restent en surface et le rendent abrasif (Il est fréquent que des lèvres de joints Spi en élastomère creusent un sillon dans l’acier trempé, d’autre part, dans la conception des coussinets de bielles, la notion « d’incrustabilité », soit l’aptitude à absorber les impuretés pour qu'elles ne restent pas en surface, est une caractéristique importante.

     Dans le cas présent je pense que la rectification du maneton n’était pas assez fine au départ même si à ce jour les heures de fonctionnement l’ont bien poli.

     - 2 la bague de tête de bielle présente une conicité de l’ordre de 0.04 mm : ne serait-elle pas due à un fonctionnement prolongé avec un maneton qui aurait été tordu bien avant mon intervention sur le tournevis à choc ?  (J’essaye comme je peux de m’innocenter …)

     Au travail :

     Bague de tête de bielle.

     Tournage en bronze phosphoreux UE12P comme il se doit.

      Le serrage dans la bielle sera de 0.04 mm, L'alésage sur le tour réalisé à 14.02 mm et repris après assemblage avec un alésoir "façon Paris" , le jeu obtenu est de 0.06 mm. Je pense que contrairement à un pied de bielle où les vitesses de frottement sont faibles, une tête de bielle, tout comme des pallier de vilebrequin demande un jeu de fonctionnement assez important, 0.06 mm m’a paru être une valeur raisonnable (le jeu mesuré aux paliers qui ne sont pas neufs est de 0.09 mm).

 

     Les bouchons en bouts d'axe de piston ont été tournés en UE12P

     Assemblage du vilebrequin :

     Sans la bielle dans un premier temps, et contrôle sur un montage "maison" à base de roulements à billes. (j'en suis très fier, ça tourne sans le moindre frottement)

     Après quelques prises de tête en jouant du comparateur dans tous les sens, j'ai compris que la soie côté embrayage n'était pas bien perpendiculaire a sa masse: 1d° d'erreur environ : un bon tube bien ajusté sur la soie, un gros marteau en cuivre, et ..... ça n'a rien fait. Je me suis souvenu du redressage du volant moteur de la P102 : les chocs sur un ensemble élastique, ç'est inefficace, rien de vaut la force lente : une barre soudée sur un tube, un boulon entre la barre et le vilebrequin, j'y vais petit à petit et ça le fait avec un beaucoup de patience, en contrôlant la progression après chaque séance de torture. (Au fait le sens de déformation était tout a fait explicable par l'action d'un bourrin qui aurait tapé avec un tournevis à choc sur l'embrayage .....mais ne le répétez pas.).

 

     Contrôle du jeu latéral de la tête de bielle avant assemblage définitif.

     Avec une cale de 0.25 mm côté embrayage la bielle se trouve bien centrée entre les masses et le jeu axial me semble correct. (pas facile à mesurer, environ 0.5 mm, il diminuera un peu après assemblage définitif du vilebrequin.

      Il est d'usage de réaliser l'emmanchement à la presse et de visser l'écrou ensuite car le filetage et l'écrou étroit risquent de ne pas supporter l'effort de serrage, OK mais quel effort doit-on appliquer pour un maneton de 14 mm ? Après étalonnage méticuleux de mon pifomètre je déclare que deux tonnes est une valeur raisonnable pour ce maneton maigrichon, que j'ai trouvé faiblement serré lors du démontage. L'effort sera obtenu par serrage de l'écrou préalablement huilé pour épargner le filetage, il sera ensuite dévissé, soigneusement dégraissé et resserré avec du frein filet sans autre dispositif de blocage.

     J'ai comme habitude de considérer qu'un système vis écrou fonctionne comme un levier de rendement très faible  compris entre 5% pour un filetage grossier à 15% pour un bon état de surface huilé. Dans les cas présent un tour d'une clé de 1 mètre (6280 mm) déplace l'écrou de 1.25 mm soit un rapport de levier de 6280/1.25 = 5024.  Le couple de serrage doit être égal à 2000 / 5024 / 0.15 = 2.6 .daN si le rendement est égal à 15%, ce même calcul donne 4.0 daN si le rendement est égal à 10%

     Les tableaux trouvé sur le net (http://www.technocalcul.com/FR/kellermanklein.php) donne la valeur intermédiaire de 30 daN sur un écrou de 10x125 de 21 sur plats pour un effort de 2 tonnes, c'est cette valeur que je retiendrai.

 

 

    

     Il a fallu peaufiner l'alignement des soies et le parallélisme des volants, quelques centièmes s'étant invités lors du serrage.

     Réalisation d'un joint en papier en respectant l'épaisseur de 0.5 mm comme à l'origine. Un montage sans cette épaisseur aurait rapproché les goujons de fixation du cylindre et réduit le diamètre de son emmanchement.

     Contrôle du jeu latéral du vilebrequin après assemblage dans les carters.

     Contrôle du bon fonctionnement de l'ensemble bielle piston cylindre, à ce stade les segments ne sont pas encore placés. Tout glisse bien l'équerrage de la bielle n'a donc pas été dégradé par les diverses opérations.

 

     Puisque les segments ne sont pas changés le honnoir est passé rapidement avec la force d'appui des pierres réglée au minimum.

     Le siège de la soupape d'admission, qui était en bon état n'a subi qu'un rapide rodage, 15 secondes ont suffi.

     Soudure de deux prothèses pour refaire deux ailettes cassées et finition au mastic haute température (1500 d°). La soudure de la fonte était une première pour moi, soyez indulgent.

     Le cylindre a été traité à l'acide phosphorique et à l'huile de coude (bio !) pour recevoir, après passivation à la soude et rinçage, deux couches de peinture noire mate haute température séchée dans un four de cuisine de récupération (qui fait désormais partie de mon outillage).

     Deux ailettes cassées ? Ah bon, où ça ???

     Découpe d'un joint d'embase en papier de 0.25 mm (je tiens à maintenir l'épaisseur pour d'origine pour éviter le choc du segment supérieur contre un éventuel "trottoir" en haut de ce fût borgne même si la métrologie n'a pas révélé d'usure significative.

 

 

     Et voilà l'objet, vous admirerez au passage le magnifique support en fer forgé en vulgaire fer plat et bois de récupération.

 

     A suivre : distribution, caractéristiques fonctionnelles, carburateur, embrayage, magnéto ..... l'hiver ne fait que commencer, il parait même qu'il y a des roues, un cadre, une fourche, des freins et plein 'autres petits trucs à restaurer.

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commentaires

M
Là c'est un peu trop technique pour moi,mais j'admire ton savoir!<br /> <br /> j'attends la suite avec impatience,et je ne doute pas qu'une fois restaurée,cette Ultima sera non seulement une splendeur,mais tournera comme le jour où elle est sortie de l'usine!<br /> <br /> tu as de quoi bien t'occuper cet hiver!<br /> <br /> amitiés<br /> <br /> Mark
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F
Et c'est une 350 comme ta Terrot, on pourra faire la course :)
G
Très impressionnant, félicitations !
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P
Ah enfin, un nouveau polar qui commence! on attend la suite. Allez, au boulot.
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